Chapitre 13 (deuxième partie)
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XIII Récit de Gilles Faivre, cinquante-deux ans, industriel
On m’accuse de cruauté. Je crois rêver. Ces personnes sont entrées chez moi, or, voyez-vous, ça ne vous semblera peut-être qu’un point de détail, mais il se trouve que je ne les y avais pas conviées. D’autres que moi en auraient pris ombrage et se seraient fâchés. Moi non.
J’ai tenu un raisonnement de bon sens, voyez-vous : ces jeunes gens désiraient entrer (ils le désiraient même très vivement puisqu’ils l’ont fait au prix de périlleuses acrobaties, comme vous ne l’ignorez pas). Parfait. Puisque tel était leur souhait, j’aurais eu mauvaise grâce à les contrarier, n’est- ce pas ?
Je n’ai donc rien entrepris pour les faire sortir, bien au contraire, j’ai même veillé à ce qu’ils profitent longuement de leur séjour.
Tout de même, me dit-on, ils y sont restés trois jours, sans manger, il n’y avait pas de lumière et il y faisait froid. Soit, je vous l’accorde. Eh bien, en signe de repentance, je dispense ces personnes du paiement de tout loyer. C’est cadeau.. . Et on prétend que je manque de cœur !
Je pourrais comparaître devant un tribunal, me dit-on encore. Il faudra sans doute que je fasse amende honorable, peut-être même serai-je condamné. Après tout, ce ne sera que justice. Rendez- vous compte : des individus s’introduisent chez moi, dégradent le mobilier, souillent les tapis... C’est impardonnable, il faut que je sois puni, n’est-ce pas ? Quant à eux, ils restent bien sûr libres de recommencer à leur guise.
Peut-être sont-ils d’ailleurs en train de le faire au moment où je vous parle. Chez vous, si ça se trouve, pourquoi pas ?
Il en va ainsi dans notre pays. Il est plus honorable de voler son prochain et de manger du hérisson comme ces gens-là que de gagner honnêtement sa vie. C’est ainsi. Mais cela changera peut-être plus tôt qu’on ne le pense. En tout cas nous y travaillons. Et nous sommes nombreux.
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